La République est une religion : la fabrique aristocratique


S'ils [le peuple] dictaient des volontés, la France ne serait plus cet État représentatif ; ce serait un État démocratique. Le peuple, je le répète, dans un pays qui n'est pas une démocratie (et la France ne saurait l'être), le peuple ne peut parler, ne peut agir que par ses représentants.
-- Archives parlementaires 1789 Abbé Sieyés.
Comment se fait-il qu'alors les débats parlementaires ont clairement statué que la République est en opposition à la démocratie, les élites martèlent que quand la République est en danger, la démocratie est en danger ? Que le pire ennemi de la démocratie serait le populisme : donner le pouvoir au peuple.

Il faut pour cela revenir à sa définition et son histoire.

La première République historique a été imposée à la démocratie Athénienne par Sparte avec le soutien d'un bonimenteur appelé Socrate.

La République comme la démocratie sont des modèles d'organisation qui diffèrent sur un point : peut-on faire confiance par défaut aux humains ?

La réponse démocrate est «tout le monde se vaut», donc tout citoyen peut se représenter, la réponse Républicaine est «la majeur partie de l'Humanité est mauvaise sauf les élites auxquelles il faut donner le pouvoir».

La base de la démocratie est le tirage au hasard, celle de la République le vote. Aristote exprime bien la différence :

Les élections sont aristocratiques et non démocratiques : elles introduisent un élément de choix délibéré, de sélection des « meilleurs citoyens », au lieu du gouvernement par le peuple tout entier.

Aristote

Meilleurs en grec se dit aristois c'est ce qui est l'origine de la définition de la République comme aristocratique.

Depuis l'origine de la République Française a-t'on vu un vagabond devenir député ? Non, la République est majoritairement bourgeoise. D'où son deuxième petit qualificatif donné par Aristophane de ploutocratie (Aristophane en accès libre sur Gutenberg chercher Ploutos et profitez de 45 minutes de lecture distrayante exprimant simplement le concept)

Ces textes simples à lire sont enseignés à l'école, disponibles dans toutes les librairies, pourtant ils ne semblent pas avoir d'impact sur notre manière de concevoir la nature profondément anti-démocratique de la République.

Comme si un filtre nous empêchait de penser ce qui est simple. Comme si nous avions appris comme des chiens de Pavlov à dire République égale démocratie. Un mécanisme Orwellien.

Le siècle des Lumières, la révolution de 1789, l'antiquité sont enseignés à l'école, les textes sont lus et on nous apprends dans notre école Républicaine, la pensée critique alors comment se fait-il que la critique n'apparaît pas ?

Je vais donner une réponse qui n'a aucune valeur statistique : mon expérience.

J'ai tenté en cours de français de donner MA lecture de la République comme opposée à la démocratie à 16 ans ; je n'ai eu que des 4/20 après coup et un dossier scolaire à chier (éliminatoire pour le rattrapage). J'ai opté pour le bac dans une approche prudente : j'ai décider d'écrire non ce que je pensais, mais ce que je devinais être la bonne parole. J'ai eu 18 et 14 au bac de français en injectant moult fausses citations dans mes devoirs.

Je vais maintenant plutôt me référer à Platon.

Pour Platon, au doigt mouillé, l'Homme est mauvais, envie les riches (qui finançaient Socrate pour prendre la parole aux assemblées démocratiques et affaiblir la démocratie) et n'a aucune vertu. Pour lui, se faire exploiter est une vertu sans laquelle l'état ne peut devenir puissant. Aristophane distingue les pauvres des miséreux. Le miséreux est tellement cassé qu'il ne peut travailler, le pauvre ne manque de rien, mais ne peut se payer le superflu, le mettant à la merci des riches (ploutois). Pour éviter que les gens qui se font exploiter s'énervent, Platon a une solution simple : la Religion et la censure.

Platon prône donc un modèle d'organisation inspiré d'une secte dont il fait parti : les pythagoriciens qui prônait que seuls ceux qui maîtrisent les fractions  dirigent la société. Secte qui se fera zigouiller pour avoir tenter un coup d'état.

Son idée est simple : créer artificiellement des castes. Sages (dirigeants), Gardiens (forces de l'ordre), peuple (la merde). Avec un ratio de 1/3 pour chaque, et pour éviter que le peuple ne prenne le pouvoir un véto dans les votes à 2/3. La fameuse majorité au 2/3 que l'on retrouve dans les Républiques.

Si Sieyès est un Républicain, il n'empêche que son analyse sur le caractère non démocratique d'un système découpé ainsi est pertinente (Qu’est-ce que le tiers état ? (wikimedia)) son analyse est qu'un système basé sur la définition d'un tiers état (aristocratique) vise à mettre les laborieux en minorité et les couper du pouvoir. Des tribuns comme Sieyès, Macron, Jean Marie Le Pen, ou Clemenceau qui pointent de manière pertinente le manque de démocratie d'une République pour appuyer encore plus d'autoritarisme républicain sont appelés à raison des populistes : des aristocrates sous un masque de démocrate.

La Révolution pour une République en marche ne vise pas à changer le système Républicain, mais la définition des aristocrates dont ils se sentent injustement écartés.

Comment, me direz vous crée-t'on une religion d'état ?

Il suffit de donner du pouvoir de manière fractionnelle aux gens. Certains peuvent faire faire à d'autres ce que d'autres ne peuvent pas leur faire faire.
On définit ainsi une pyramide de pouvoir où un collège savant se targue de définir LA Vérité. Une vérité non critiquable à l'adhésion de laquelle toute charge honorifique dans l'organisation est liée. On appelle ce modèle en grec le pouvoir du sacré (hiéros-archein = hiérarchie)

Il ne peut y avoir de République sans une gigantesque entreprise de sacralisation de l'autorité pyramidale qui s'auto-entretient par l'éducation. En ceci le but de l'éducation jacobine (centralisée) a pour but la sélection d'une élite en stricte adhésion avec les dogmes Républicains.

Aux laborieux l'éducation apprends la soumission volontaire pour le bien supérieur, aux futurs dirigeants les lois et mécaniques de dominations.

Renommons les choses comme l'Église les nomme :
appelons le président le Pape.
Se crée-t'il tout seul ? Non il doit être adoubé par le concile des cardinaux.
Qui sont les cardinaux ? Des ecclésiastes de différentes sensibilité avec plus de pouvoirs que les autres qui se soumettent volontairement au Pape. Et ainsi de suite, on définit des échelles de privilèges proportionnels.

Quels sont les ordres de l'église ?

Les curés qui longtemps faisaient les tâches de propagande et d'administration (prêche, registre des naissances & décès, assistance aux démunis) comme une part de notre service publique dont l'éducation nationale.

Les abbés qui coordonnaient tout ça comme nos maires.

Les jésuites qui s'occupaient de l'évangélisation et la formation des élites, comme nos universités et nos professeurs.

Les templiers qui s'appropriaient par la force les biens d'autrui ...

L'inquisition responsable par sa prise de parole de décréter les opinions acceptables ou non (les hérésies) que l'on pourrait comparer à nos élites intellectuelles et artistiques.

La religion républicaine est une tumeur qui touche tout les corps dit d'élite et se maintien primairement comme toute bonne religion par le contrôle de LA vérité.

Comment lutter me direz vous ?

Comment la Religion catholique a été démise de son emprise sur les gens je répondrait.

Il y a plusieurs manière de faire.

La première et ma préféré est la méthode dite de la Révolution Tranquille qui au Québec a vu les Églises être désertées du jour au lendemain. Les gens ont voté avec leurs pieds. Ils ont arrêté d'aller à la messe, commenter la parole de l'Église ou polémiquer. Ils ont simplement ignorer l'église. C'est comme s'abstenir de voter, on coupe au système représentatif biaisé sa légitimité du nombre et de l'espace de parole.

La deuxième est dans mon histoire familiale de descendant des huguenots : cela consiste à ne plus laisser d'autres vous dire comment penser si ils n'acceptent pas la discussion d'égal à égal. La lecture des textes politiques et leur interprétations ne doit pas être laissé à une élite, mais les textes doivent être traduits en langue vernaculaire (simple et compréhensible de tous) et véhiculé et discuté en commun, dans un espace commun protégé de sanction.

Le problème de ses 2 techniques et qu'elles exigent un pré-requis : ce que les pédants modernes appellent l'éthique discutionnelle, les grecs l'iségorie.

Un espace de parole publique où la voix de tous a la même portée.

Je pense que maintenant vous voyez où je veux en venir : la République ne peut se maintenir sans contrôler les flux d'informations (censure) et la définition des mots (l'éducation centralisée).

Pour sortir de la République, il faudra lutter pour faire revenir les canaux latéraux d'échange publique où tous ont la même voix. Ces endroits considérés comme colporteurs de #FakeNews par les Républiques : café du commerce, réseaux sociaux, lieux d'éducation alternatifs, affichage sauvages (et graphs sur les murs), toute structure non hiérarchique (donc non corruptible), colporteurs ...

Voilà, si vous aussi êtes démocrates et convaincus de l'ignominie de la République je vous enjoints à 2 choses : profiter des réseaux sociaux tant qu'ils ne sont pas trop contrôlés (iségorie), et inciter les gens à l'abstention aux élections (révolution tranquille).

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